1 tribune et 1 article à lire dans Les Echos des 3 et 4 août 2020 :
Une tribune de Carlo Ratti sur le projet abandonné de Google à Toronto
C'est l'une des victimes les moins connues du Covid-19. Sidewalk Labs, société soeur de Google, a renoncé à son projet de « smart city » à Toronto (Canada). L'incertitude économique aura eu raison de cette « Google City », même si ce projet a toujours fait l'objet de vives contestations. Ses opposants qualifiaient ce projet d'« Etat de surveillance de 800 hectares » en raison des inquiétudes relatives à la protection de la vie privée et à l'exploitation des données.
Tout avait pourtant bien commencé pour ce quartier. Il était prévu qu'une friche industrielle soit transformée en laboratoire de la ville intelligente, avec robo-taxi ou collecteurs de déchets autonomes, optimisée par un ensemble de capteurs. Le PDG, Daniel Doctoroff, avait expliqué que le projet permettrait d'expérimenter nombre d'initiatives pour limiter la congestion des villes ou le changement climatique.
L'ère des villes intelligentes
En tant que membre du comité consultatif pour le développement de ce projet, j'ai été témoin à la fois de sa promesse et de son incertitude. Bien que les préoccupations du public fussent tout à fait légitimes, je crois que l'échec du projet est en fin de compte une perte non seulement pour Sidewalk Labs, mais aussi pour Toronto, et notamment pour l'innovation urbaine, particulièrement nécessaire aujourd'hui, car l'Internet des objets permet une nouvelle vague d'expérimentations.
Nous entrons dans l'ère des villes intelligentes, où les technologies de l'information et de la communication recueillent des quantités extraordinaires de données et déploient leurs résultats pour transformer les démarches économiques et administratives. Une gamme de start-up qui allient le physique et le numérique, celles que Richard Florida appelle les entreprises « urbantech », sont à la pointe du mouvement des villes intelligentes.
Comment tester l'innovation numérique dans l'espace physique ? La reconnaissance faciale, le traçage par mobile et les véhicules autonomes soulèvent d'immenses questions éthiques. Nous devons alors essayer une variété d'approches sur la meilleure façon d'intégrer ces avancées technologiques dans nos vies et peser le pour et le contre, presque comme dans un processus évolutif.
Participation citoyenne
Fait intéressant, dans le cas de Toronto, les opposants au projet étaient moins préoccupés par les risques d'échec que par ceux de réussite. Ils craignaient que Sidewalk puisse exploiter leurs terrains, leur économie et leur vie privée. L'écrivain Cory Doctorow, militant du mouvement citoyen #Blocksidewalk, a écrit « en tant qu'auteur de science-fiction dystopique […] c'est évidemment une terrible idée de laisser des multinationales opaques privatiser d'énormes zones de notre ville ».
Toutefois, ce ne sont pas là l'essentiel des raisons qui expliquent l'abandon du projet. Ce qui a manqué, c'est un solide débat public. Les échanges entre les opposants et l'entreprise ont hélas tourné à l'affrontement. Le véritable « city making » (faire la ville, en français) est bien l'art de rassembler des voix différentes. Dans un forum ouvert, on peut corriger les problèmes au fur et à mesure qu'ils surviennent.
L'amélioration des plateformes de participation communautaire est un outil formidable pour continuer à expérimenter l'innovation urbaine. Nous avons besoin de plus de « Google City », construites par des start-up avec les citoyens.
Carlo Ratti, architecte et ingénieur, dirige le Senseable City Lab au Massachusetts Institute of Technology et est fondateur de l'agence de design et innovation CRA-Carlo Ratti Associati. Une version antérieure de cet article a été publiée sur le Yale University Press Blog sous le titre « Do We Need More Google Cities ? »
Source : "Google City : tirer les leçons d'un échec" - Carlo Ratti - Les Echos du 3 août 2020
Google et la maison connectée :
Le géant américain de l'internet Google, propriétaire de la marque Nest et ses thermostats, caméras, sonnettes, ou serrures connectés, a noué un partenariat de long terme avec la société spécialisée dans la sécurité domestique ADT.
ADT, une société basée en Floride qui a développé un réseau de 20.000 personnes installant et maintenant des systèmes d'alarmes, d'objets automatisés ou connectés pour les maisons, va intégrer dans son offre les produits Nest, détaille un communiqué . Les maisons de particuliers et les petites entreprises sont la cible du partenariat.
A plus long terme, les appareils Nest deviendront la pierre angulaire de l'offre maison intelligente d'ADT, qui fonctionne aujourd'hui avec d'autres partenaires comme Samsung. Cela permettra moins de fausses alarmes, des détections plus pertinentes et des notifications plus précises, espèrent les deux groupes.
Google, filiale d'Alphabet, va dans le même temps payer 450 millions de dollars pour acquérir 6,6 % des parts d'ADT.
Chacune des deux sociétés s'est par ailleurs engagée à investir 150 millions de dollars pour des dépenses de marketing, de développement de produits, de technologie et de formation des employés.
ADT a environ 6 millions de clients aux Etats-Unis potentiellement intéressés par l'offre Nest. Depuis 2015, Google propose le service sur abonnement Nest Aware qui enregistre en permanence ce qui se passe autour d'une résidence et donne accès aux enregistrements déclenchés par des mouvements sur les 30 derniers jours.
« Le partenariat permet de combiner le matériel et les services de Google avec les solutions de sécurité pour la maison d'ADT, à installer soi-même ou à faire installer par des professionnels, afin d'innover dans le secteur de la sécurité », souligne le communiqué.
Source : "Google mise un peu plus sur la maison connectée" - Les Echos - 4 août 2020
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