Alors que la situation des villes de banlieue est de plus en plus alarmante (cf. la "Lettre à ceux qui ignorent les banlieues", parue dans le JDD de ce dimanche ou encore l'entretien avec le député-maire de Saint-Denis, dans le Monde du 22 mai, qui estime que son département est « au bord de la crise de nerfs »), le gouvernement vient, ce jour, de repousser à 2011 la réforme de la politique de la ville.
Une telle décision est d’autant plus étonnante que la politique de rénovation urbaine, au cœur de l’actuelle politique de la ville, montre clairement ses limites. Il faut lire le rapport 2009 du Comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU, paru début avril 2010, pour s'en convaincre. Le constat qu’il dresse est pour le moins sévère. Nous en reprenons ci-dessous les principales conclusions.
L’objectif principal de la rénovation urbaine, initiée en 2004 avec le programme national de rénovation urbaine (PNRU), est de favoriser la mixité sociale en construisant des logements différents des logements sociaux antérieurs : nouvelles morphologies (immeubles bas, regroupés en îlot et à l’architecture différente des barres et tours) et nouveaux statuts (logements locatifs libres, logements en accession à la propriété,…) visent à favoriser l’installation d’une nouvelle population et à banaliser les quartiers. Cet objectif n’a pas été atteint. L’une des raisons est le décalage temporel entre les opérations de démolition et de reconstruction de logements sociaux - qui s’accroît et qui, dans un contexte de crise du logement, risque d’ailleurs d’aggraver localement les tensions dans le secteur du logement social.
Mais les raisons vont au-delà de simples problèmes de mise en œuvre. Sont ainsi pointés du doigt : le manque d’articulation entre les politiques sociales et les politiques urbaines - qui a été paradoxalement renforcé par le PRNU ; le phénomène de zonage et l’absence d’une gouvernance globale d’agglomération qui expliquent que le transport urbain et le développement économique local soient largement déconnectés de la rénovation des quartiers ; l’insuffisante prise en compte du volet commercial.
C’est ainsi, fondamentalement, la finalité même de la rénovation urbaine qui est remise en cause. La banalisation des quartiers est certes nécessaire mais pas suffisante pour améliorer de façon décisive la vie des habitants, et rares sont les projets qui ont permis de redonner une attractivité au territoire.
Ce manque d’ambition est d’autant plus regrettable que le PNRU représente près de 40 milliards d’euros d’investissement pour la période 2004-2013 (dont 12 milliards d’euros financés par l’ANRU, et le solde financé par les collectivités locales et les bailleurs sociaux) et que la pérennité des investissements réalisés dans ce cadre n’est pas assurée.
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