Très intéressant article de Henri Briche et Maxime Huré à lire dans Métropolitiques (ici) sur la gratuité totale des transports publics prévue à Dunkerque pour 2018.
Extrait :
En France, malgré une diffusion importante du dispositif, l’initiative de Dunkerque s’inscrit dans un contexte institutionnel très critique vis-à-vis de la gratuité des transports. (...). Ces organismes s’accordent sur les défis financiers que pose la gratuité, son manque d’impact sur la répartition modale, la dévalorisation symbolique et physique du service public qu’elle entraîne, ainsi que l’inadéquation avec la préoccupation principale des usagers, plus concernés par la qualité de l’offre que par son coût. Cette hostilité théorique à l’égard de la gratuité ne doit, cependant, pas éclipser le déficit d’enquêtes scientifiques récentes pouvant attester des effets d’une telle politique.
Les premiers éléments de l’enquête menée à Dunkerque sur l’impact de la gratuité les week-ends tendent à déconstruire certaines idées largement partagées par les acteurs des transports urbains.
D’abord, l’incivilité n’a pas augmenté dans les bus dunkerquois. On observe même une diminution des actes de vandalisme durant les week-ends malgré l’augmentation de la fréquentation : un nombre plus important de voyageurs aurait pu engendrer mécaniquement une recrudescence des dégradations.
Ensuite, et même s’il faudra avoir plus de recul pour évaluer ces données sur le long terme, la gratuité ne semble pas poser un risque financier important pour la CUD : les recettes commerciales ne couvraient que 12 % des dépenses de fonctionnement – soit 4,5 millions d’euros. La prise en charge de cette perte de revenus relève surtout d’un choix politique en matière d’allocation des ressources publiques de la CUD et ne s’apparente pas à une mise en péril des finances locales. En d’autres termes, la gratuité est rendue possible par le transfert de fonds publics prélevés sur les administrés ou sur le budget de la collectivité : elle résulte donc d’une volonté politique d’investir dans les transports en commun. Dans le cas de Dunkerque, la gratuité est techniquement et financièrement réalisable pour une agglomération de 200 000 habitants, battant en brèche l’hypothèse selon laquelle cette mesure ne serait applicable qu’aux réseaux de villes moyennes.
Enfin, l’attractivité du centre-ville dunkerquois semble sortir renforcée de cette initiative : nombreux sont les enquêtés affirmant profiter davantage des aménités commerciales et récréatives du centre-ville durant le week-end du fait de la gratuité. La décision de délaisser la voiture au profit du bus gratuit permet notamment de déambuler dans les rues sans aucune appréhension de la contrainte horaire qu’implique le stationnement automobile.
Pour aller plus loin ce sujet, lire également notre article de 2015 dans Futuribles sur "la ville restera-t-elle gratuite ?" (ici) et nos précédents billets, notamment :
- Toulouse supprime la gratuité (des cantines)
- La ville au défi de la gratuité, suite
- La ville au défi de la gratuité
- La compétitivité des trottoirs, ou la privatisation de la ville saisie par le roman
Ci-dessous une image trouvée sur un site militant pour la gratuité des transports publics (ici).
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