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Cette question sert de titre à une très intéressante tribune de Tom Morisse, responsable de la recherche de Fabernovel, dans Les Echos de ce jour.

Extrait :

Enfin ! Cinquante ans après les débuts d'Internet, nous avons dépassé pour la première fois le seuil de 50 % de la population mondiale connectée. C'est une bonne raison pour analyser le chemin parcouru tout comme les enjeux qui demeurent.

En 1995, Mary Meeker, aujourd'hui investisseuse en capital-risque, présentait pour la première fois ses Tendances Internet. Elle décrivait alors un univers de pionniers américains, avec 9 millions d'utilisateurs du Web, dont 75 % aux Etats-Unis. En 2019, elle dissèque ce qui est devenu un quotidien planétaire : 3,8 milliards d'utilisateurs dans le monde, dont, autre première, plus de la moitié se trouve dorénavant en Asie-Pacifique. Internet était un secteur parmi d'autres. En 2019, le numérique a infusé l'ensemble de l'économie : 7 des 10 plus grandes entreprises mondiales sont technologiques.

Si le numérique a bel et bien mangé le monde,  l'étude de Mary Meeker démontre que cette conquête est synonyme d'entrée dans la maturité. Que ce soit dans les intentions - en 2018, près de deux tiers des Américains souhaitent limiter l'usage de leur smartphone. Ou dans les usages - en Chine, le temps moyen passé par les utilisateurs sur leurs smartphones plafonne depuis la mi-2018.

La conséquence est majeure sur le plan concurrentiel : les coûts d'acquisition des clients sont de plus en plus élevés, et seuls les acteurs les plus proches des besoins client seront capables de les amortir en fidélisant les utilisateurs. C'est ce contexte qui explique la montée en puissance de l'économie de l'abonnement, synonyme de proximité permanente avec les utilisateurs et bien sûr de revenus récurrents.

Mais, et c'est là un étonnant paradoxe, la popularisation de ce modèle crée un nouveau point de souffrance : la multiplicité des abonnements engendre ce que les Américains nomment « subscription fatigue » (lassitude face aux abonnements, en français). On trouve déjà des services pour gérer ses abonnements, éliminer ceux peu utilisés et remplacer les trop chers, comme le propose la start-up Ideel, en France.

Afin de gagner des parts d'usage dans cet écosystème mature, deux opportunités sont à explorer. La première est de répondre à des besoins spécialisés face à des géants du numérique qui ont fini par devenir des généralistes. C'est par ce biais que sont apparues les « digitally native vertical brands », sur lesquelles Mary Meeker fait l'impasse. Ce sont des marques qui, à l'instar de Warby Parker dans les lunettes, ciblent des besoins précis auxquels ils répondent par une intégration verticale poussée (allant parfois de l'usine jusqu'au magasin), un contact utilisateur direct et une expérience remarquable.

La seconde est que l'écosystème numérique, s'il est mature, connaît un renouvellement permanent par les générations nouvelles. Et dans cette perspective, une tendance nette se dégage de ces Tendances Internet : la socialisation de la génération Z se fait de plus en plus à travers les jeux vidéo. Les outils de communication et réseaux sociaux prennent dorénavant place au sein de ces environnements.

L'autre défi majeur de notre ère numérique est l'impact écologique de tous nos appareils et réseaux. Il y a urgence à questionner nos usages, quand on sait par exemple qu'écouter un album en ligne sur un système hi-fi haut de gamme consomme trois fois plus d'électricité que de lire un CD physique.

Entre maturité et renouvellement permanent, entre saturation et satiété, s'imposer dans le monde numérique n'a jamais autant été un exercice d'équilibriste.

Il s'appuie sur la non moins intéressante étude "Internet Trends 2019", de Mary Meeker, téléchargeable ici (vidéo de présentation également disponible ici). L'étude est dense (334 slides !) mais riche d'enseignements précieux et d'exemples.

Elle s'intéresse notamment aux nouveaux modèles freemium (cf. notre dernier billet !) et aux "super-app" (cf. notre avant-dernier billet !!).

 

 

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