Gouverner le trottoir
Encore un article sur le trottoir, certes, mais… non sans Esprit !
Par rapport à nos précédents articles ou billets sur le sujet (#Trottoir), on y explique pourquoi le trottoir est un objet politique à identifier, et pourquoi les municipalités devraient se saisir de cet espace urbain comme d’un enjeu de régulation, mais aussi comme un levier politique.
Extrait : Le paradoxe du trottoir : entre « non-lieu » et suroccupation
« Trottoir » est un mot si courant que les petits enfants savent ce qu’il désigne. Il figure d’ailleurs en bonne place dans les imagiers à destination des tout-petits. Pourtant, le terme est largement absent du langage des urbanistes et des penseurs de la ville : il ne figure par exemple pas dans les dictionnaires de référence que sont L’Aventure des mots de la ville ou Les 100 mots de la ville. Les urbanistes et penseurs de la ville en France privilégient le plus souvent l’expression « espace(s) public(s) ». Une première explication est certainement que l’« espace public » est à la fois plus large (il inclut aussi l’autre partie de la rue qu’est la chaussée, et les places et les espaces verts) et davantage porteur des valeurs de citoyenneté. Mais une autre raison est sans doute la connotation négative qu’on attache en France au mot « trottoir », associé à « la vie dans la rue » et à la prostitution. Le trottoir occupe ainsi une place essentielle dans l’œuvre de la grande urbaniste américaine Jane Jacobs mais, dans l’édition française, le mot « sidewalk » est systématiquement traduit par « rue ». Ce détour sémantique souligne d’ailleurs la difficulté qu’on a, en France, à nommer les différentes parties physiques de la rue. Si les Nord-Américains utilisent le terme « sidewalk » (les Anglais disent « pavement »), ils emploient aussi très souvent le mot « curb » pour désigner la ligne de démarcation entre la chaussée et le trottoir. Dans cet article, nous emploierons le mot « trottoir » dans un sens assez large qui désigne la zone comprise entre la façade des immeubles et la chaussée, mais qui comprend aussi la bande de stationnement.
À cette imprécision lexicale, s’ajoute un vide juridique. Le trottoir n’existait pas juridiquement avant 2010, et sa définition reste encore très fragile, à tel point que l’association 60 Millions de piétons a récemment demandé une sanctuarisation juridique du trottoir. Par ailleurs, ce qui relève du fonctionnement de la rue est systématiquement éclaté entre les différents services d’une collectivité, de la propreté aux espaces verts, de la voirie au stationnement, ou à l’urbanisme, et le trottoir est rarement considéré pour lui-même.
La suite est à lire en version papier (dans un riche numéro consacré notamment au Rwanda), ou numérique : ici.
Et aussi dans la revue Esprit, nos précédents articles : “Financer la ville à l’heure de la révolution numérique“, co-écrit avec Clément Fourchy (Espelia) et Nicolas Rio (Partie Prenante) (Juin 2017) et “La nouvelle privatisation des villes” (Mars/avril 2011).