Ce billet a été écrit par Sarah Fryde, étudiante en khâgne.
Le 19 avril dernier, Total annonçait le projet d’une nouvelle branche baptisée « gas renewables and power » qui devrait prendre forme à partir du 1er septembre. En créant cette nouvelle branche, centrée sur l’aval du gaz et des énergies renouvelables, le PDG de Total, Patrick Pouyanné, affiche clairement sa volonté de prendre en compte les enjeux climatiques dans sa stratégie à long terme.
Total est sorti du charbon et veut devenir « le Major pétrolier de l’énergie responsable ». Le groupe a déjà englouti des millions de dollars dans le solaire (plombé par les pertes de Sunpower jusqu’en 2012). Les sommes qu’il compte investir dans ses nouvelles activités, 500 millions de dollars par an, ne sont pas négligeables. Si certains jugent ses actions insuffisantes, elles ont au moins le mérite d’exister.
Patrick Pouyanné expose ce projet dans une interview réalisée par Anna Feitz pour Les Echos.
Cette mesure témoigne-t-elle d’une certaine urgence ?
« Pour faire face à la volatilité des cours du baril, il faut s’engager dans la recherche de l’efficacité à court terme. Mais il faut aussi construire le long terme. Au terme d’un travail participatif de plusieurs mois, nous avons défini une ambition pour Total à 20 ans, un projet d’entreprise baptisé « One Total » ».
Quelle vision pour le groupe ce projet traduit-il ?
« One total (…) est une ambition. Total est un grand acteur de l’énergie, une major ayant vocation à être intégrée sur toute la chaîne de valeur de ses métiers. C’est déjà vrai pour le pétrole. (…) Nous voulons que ce soit davantage le cas pour le gaz. (…) Enfin il nous faut intégrer le défi du changement climatique, et l’évolution du mix énergétique qui va en découler : (…) la part du pétrole va baisser, au profit du gaz et des renouvelables. (…) Nous continuerons à produire du pétrole mais nous nous concentrerons sur les projets à bas coût, nous poursuivrons une stratégie offensive sur le gaz. Enfin, nous intégrerons un nouveau métier : l’électricité. (…) La nouvelle branche « gaz renewables and power » regroupera l’aval gaz, les énergies renouvelables, ainsi que des activités d’efficacité énergétique ».
Vous voulez concurrencer les grands électriciens ?
« Nous resterons une major pétrolière, notre objectif n’est pas de devenir électricien. Mais le XXIe siècle sera électrique. (…) Dans le solaire par exemple, nous n’avons pas vocation à seulement fabriquer des panneaux, mais bien produire aussi de l’énergie. Notre filiale SunPower a d’ailleurs déjà amorcé ce mouvement vers l’exploitation de centrales solaires ».
Pourriez-vous aller jusqu’à exploiter des centrales à gaz ?
« Notre objectif est d’abord de générer de la demande en gaz. Nous regarderons aussi différentes énergies renouvelables en dehors du solaire. La seule activité que nous excluons catégoriquement, c’est le nucléaire. »
Vous avez affiché un objectif de 20% de votre portefeuille pour ces activités nouvelles dans 20 ans. N’est ce pas très ambitieux ?
« Il s’agit d’u objectif symbolique destiné à afficher notre ambition interne : un slogan « 20 % dans 20 ans. Le rythme de développement de ces activités n’est pas encore défini. Nous voulons tirer parti de leur croissance mais cette croissance devra être rentable. »
N’est-il pas contradictoire pour un groupe pétrolier de se déclarer préoccupé par le changement climatique ?
« Le défi est là, il faut s'en saisir plutôt que de subir. C'est en ce sens que nous allons créer une nouvelle direction Stratégie & Climat, qui doit prendre en compte l'objectif de limiter le réchauffement à 2°C dans notre stratégie. (…) Notre position sur le climat est innovante ».
Source : « Total va intégrer un nouveau métier : l’électricité » - Anna Feitz – Les Echos – 19 avril 2016
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